Les dossiers de Chrysallis

Le cadre légal de l’intervention de l’administrateur ad hoc en matière pénale

Orléans 16 juin 2004

 

 

 

Textes

 

- Art. 389-3 C. civ. : De la tutelle

 

« L’administrateur légal représentera le mineur dans tous les actes civils, sauf les cas dans lesquels la loi ou l’usage autorise les mineurs à agir eux-mêmes.

Quand ses intérêts sont en opposition avec ceux du mineur il doit faire nommer un administrateur ad hoc par le juge des tutelles. (L. n° 93-22 du 8 janv. 1993) A défaut de diligence de l’administrateur légal, le juge peut procéder à cette nomination à la demande du ministère public, du mineur lui-même ou d’office. »

 

 

- Art. 706-50 C.P.P. : De la procédure applicable aux infractions de nature sexuelle et de la protection des mineurs victimes ( L. n° 98-468 du 17 juin 1998 )

 

« Le procureur de la république ou le juge d’instruction, saisi de faits commis volontairement à l’encontre d’un mineur, désigne un administrateur ad hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n’est pas complètement assurée par ses représentants légaux ou par l’un d’entre eux. L’administrateur ad hoc assure la protection des intérêts du mineur et exerce, s’il y a lieu, au nom de celui-ci les droits reconnus à la partie civile. En cas de constitution de partie civile, le juge fait désigner un avocat d’office pour le mineur s’il n’en a pas déjà été choisi un.

Les dispositions qui précèdent sont applicables devant la juridiction de jugement. »

 

 

- Art. 706-53 C.P.P. : De la procédure applicable aux infractions de nature sexuelle et de la protection des mineurs victimes ( L. n° 98-468 du 17 juin 1998 )

 

« Au cours de l’enquête ou de l’information, les auditions ou confrontations d’un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 sont réalisées sur décision du procureur de la République ou du juge d’instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal, en présence d’un psychologue ou d’un médecin spécialistes de l’enfance ou d’un membre de la famille du mineur ou de l’administrateur ad hoc désigné en application de l’article 706-50 ou encore d’une personne chargée d’un mandat du juge des enfants. »

 

 

- Art. R. 53-8 CPP institué par le décret du 16 septembre 1999 modifiant le Code de procédure pénale et le nouveau Code de procédure civile et relatif aux modalités de désignation et d’indemnisation des administrateurs ad hoc

 

« Dans les trois mois de l’achèvement de sa mission, l’administrateur ad hoc transmet à l’autorité qui l’a désigné un rapport dans lequel sont détaillées les démarches effectuées pour l’exercice de la mission définie à l’article 706-50 et précisées, le cas échéant, les formalités accomplies en vue du placement des sommes perçues par le mineur à l’occasion de la procédure. »

Introduction

 

Aborder le thème de la mission de l’administrateur ad hoc, c’est à la fois :

-         lui donner un champ d’intervention

-         poser des limites

 

C’est poser les questions :

-         que doit-il faire ?

-         jusqu’où peut-il aller ?

 

Ma formation de juriste mais surtout mes recherches doctorales sur ce sujet m’ont aidé à cadrer le mandat de l’administrateur ad hoc au regard des règles légales. En effet, le juriste a dit-on, la réputation d’être précis dans ses propos. Il est ce que certains appellent un « maniaque du mot juste ». De plus, il ne peut s’empêcher d’analyser chaque mot, chaque concept, chaque idée émise par la doctrine ou par la jurisprudence. Il y a des sujets qui sont plus enclins que d’autres à susciter une polémique, voire qui l’exigent. Tel est le cas lorsqu’on aborde la représentation « ad hoc » du mineur. Tenter de définir le plus précisément sa nature est un travail essentiel afin d’éviter les confusions, lever les ambiguïtés et comprendre les difficultés que rencontrent en pratique les administrateurs ad hoc. On ne peut faire abstraction de cet exercice, difficile au demeurant.

 

En matière pénale, je m’appuierais sur 4 textes pour cerner le contenu du mandat de l’administrateur ad hoc :

 

 

1°) L’art. 389-3 C. civ.

 

« L’administrateur légal représentera le mineur dans tous les actes civils, sauf les cas dans lesquels la loi ou l’usage autorise les mineurs à agir eux-mêmes.

Quand ses intérêts sont en opposition avec ceux du mineur il doit faire nommer un administrateur ad hoc par le juge des tutelles. (L. n° 93-22 du 8 janv. 1993) A défaut de diligence de l’administrateur légal, le juge peut procéder à cette nomination à la demande du ministère public, du mineur lui-même ou d’office. »

 

Ce texte est le fondement même de la représentation du mineur. Institué en 1910, il a été modifié à 2 reprises :

-         par la loi du 14 décembre 1964 qui a institué le juge des tutelles et réformé le droit des incapables mineurs

-         par la loi du 8 janvier 1993 qui a élargi les modalités de désignation de l’administrateur ad hoc

 

Il ressort de ce texte que la représentation du mineur est une des modalités d’exercice des droits du mineur et qu’il n’a pas à être représenté :

-         lorsqu’une disposition légale lui confère expressément le pouvoir d’agir seul (assistance éducative – délinquance juvénile)

-         lorsque l’usage le lui permet

 

Ce texte relatif à la représentation est laconique : il parle de représenter le mineur dans une procédure ou lors d’un acte civil.

Action en remplacement d’autrui, la représentation suppose l’accomplissement d’un acte juridique ou d’une action par une personne qui n’intervient pas en son propre nom mais au nom d’autrui, qui n’agit pas pour son compte mais pour le compte d’autrui. Cette définition met l’accent sur le rôle essentiel du représentant qui agit par substitution, qui par la volonté exprimée, va engager la personne qu’il remplace. Les effets de l’acte ne sont pas supportés par celui qui agit, le représentant, mais par celui au nom duquel on agit, le représenté.

 

Dans ce contexte, l’administrateur ad hoc agit au nom et pour le compte du mineur avec cette particularité que ce dernier n’émet pas lui-même son propre choix ou la volonté qui forme l’acte juridique. Bien que personne juridique, le mineur disparaît derrière l’écran de la représentation. Cette idée se retrouve avec force dans la définition originaire du mot « personne », qui désigne « le masque des acteurs ».

 

Cela dit, la représentation, moyen juridique pour pallier l’incapacité d’exercice et conçue dans l’intérêt de l’incapable, ne doit pas se révéler violente dans sa mise en œuvre. Représenter un mineur, c’est comme on vient de le voir, prendre sa place sur la scène judiciaire. Faut-il alors l’exclure de toutes les décisions importantes qui le concernent ? Dans la mesure où c’est lui qui supportera les conséquences de la décision judiciaire, n’est-ce pas en ce cas, une autre forme de violence que de le maintenir dans un état d’incapacité, c’est-à-dire décider sans lui, contre lui ou pour lui, au nom de ses intérêts ? Que dire de ces administrateurs ad hoc qui prennent des décisions sans avoir rencontré l’enfant et qui l’excluent de la procédure ? Pour eux, la justice est une affaire d’adultes où les enfants n’ont pas leur place. Or, ces enfants, n’ayant pu exprimer leur sentiment, n’ayant pas été informés, se sentent dépossédés de leur affaire. Cette pratique n’est pas à préconiser car on risque de rejouer le même scénario familial, à savoir substituer un autre abus de pouvoir, d’autorité au premier. Elle crée ce que l’on appelle une « victimation secondaire » ou une « surviolence » entraînant des conséquences psychologiques néfastes pour l’enfant.

 

Aussi, suis-je favorable à une autre conception plus large mais aussi plus humaniste du mandat qui consiste à respecter l’enfant. Dans les faits, cela consiste à entrer en communication avec lui, l’écouter et lui restituer les enjeux des décisions prises pour lui. Cette conception exclut toute généralisation, toute règle préétablie. Cela suppose une étude très précise et complète de la situation avant toute prise de décision.

En cas de divergence entre la parole exprimée par l’enfant et la position arrêtée par son représentant, il est important que l’administrateur ad hoc demande à l’avocat d’exprimer ces deux positions à l’audience.

 

 

2°) L’art. 706-50 CPP

 

« Le procureur de la république ou le juge d’instruction, saisi de faits commis volontairement à l’encontre d’un mineur, désigne un administrateur ad hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n’est pas complètement assurée par ses représentants légaux ou par l’un d’entre eux. L’administrateur ad hoc assure la protection des intérêts du mineur et exerce, s’il y a lieu, au nom de celui-ci les droits reconnus à la partie civile. En cas de constitution de partie civile, le juge fait désigner un avocat d’office pour le mineur s’il n’en a pas déjà été choisi un.

Les dispositions qui précèdent sont applicables devant la juridiction de jugement. »

 

Texte qui a remplacé l’art. 87-1 CPP institué par la loi du 10 juillet 1989 de portée trop restrictive. Il s’ensuit depuis juin 1998 des modifications substantielles :

-         la suppression de toute référence à la qualité de l’auteur de l’infraction fait que toute forme de maltraitance, qu’elle soit exercée par le parent exerçant l’autorité parentale ou non, est visée.

-         la désignation d’un administrateur ad hoc dès la phase de l’enquête préliminaire, 1ère phase du processus pénal

-         l’obligation pour les juges pénaux de désigner un administrateur ad hoc lorsqu’ils constateront que les intérêts du mineur victime ne sont pas complètement protégés.

 

Cet article 706-50 du Code de procédure pénale lui confère expressément comme mission :

-         d’assurer la protection des intérêts du mineur

-         et d’exercer, s’il y a lieu, au nom de ce mineur, les droits reconnus à la partie civile.

 

v     La protection des intérêts du mineur

 

La loi du 17 juin 1998 a innové en précisant que l’administrateur ad hoc devait assurer, outre l’exercice des droits reconnus à la partie civile, « la protection des intérêts du mineur ».

 

Cet ajout est vivement critiqué par certains juristes car, par sa généralité, il créerait une confusion entre ce qui relève de la protection du mineur et ce qui relève de sa représentation. Cette crainte est-elle vraiment fondée dans la mesure où il est question de la protection des intérêts de l’enfant, non de sa personne ? De plus, la défense des intérêts de l’enfant est bien la finalité de sa représentation confiée à l’administrateur ad hoc.

 

Tout au plus, il ne peut s’agir que des droits procéduraux. En aucun cas, cette écriture malheureuse du texte ne doit permettre à l’administrateur ad hoc d’intervenir dans la vie, l’éducation du mineur ; en d’autres termes tout ce qui touche à l’autorité parentale.

 

Cela dit, la mission de l’administrateur ad hoc désigné sur le fondement de l’article 706-50 du Code de procédure pénale ne doit pas se limiter à la seule « protection des intérêts du mineur » comme on peut le lire dans certaines décisions qui le désignent.

 

Il doit aussi, si besoin est, exercer les droits reconnus à la partie civile.

 

v     L’action civile

 

L’action civile est l’action en réparation d’un dommage qui a son origine dans une infraction pénale. Elle appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage. En l’espèce, elle est exercée en même temps que l’action publique devant la juridiction répressive.

 

Une fois désigné, l’administrateur ad hoc est libre de définir sa propre orientation. Il dispose d’un pouvoir discrétionnaire quant à l’opportunité de se constituer partie civile. En effet, les termes « s’il y a lieu » et « en cas de » ne créent aucune obligation à la charge de l’administrateur ad hoc.

Outre le fait que la constitution de partie civile ne peut s’envisager qu’aux stades de l’instruction et de jugement, l’administrateur ad hoc est nullement lié par la décision du magistrat qui l’a désigné. Il peut donc tout au long du procès pénal :

-         se constituer ou non partie civile,

-         choisir le moment de sa constitution

-         mais également se désister ensuite.

 

Un juge d’instruction qui change d’administrateur ad hoc au motif qu’il ne se constitue pas partie civile rapidement est contestable en droit comme le sont les désignations où ne figurent plus les termes « s’il y a lieu ».

 

Cela dit, la constitution de partie civile est essentielle et répond à l’intérêt de l’enfant, car il n’est plus considéré comme simple témoin, mais comme partie à la procédure. A ce titre, il peut :

-         participer et s’associer à la recherche de la manifestation de la vérité (faits complexes, dénégation de l’auteur présumé)

-         demander et éventuellement obtenir réparation de son préjudice subi par l’attribution d’une certaine somme d’argent, appelée dommages-intérêts.

 

De plus, il est :

-         informé très exactement et de manière permanente du déroulement de la procédure par l’intermédiaire de son avocat qui a seul accès au dossier pénal.

-         assisté de son avocat lors des auditions et confrontations chez le juge d’instruction ainsi qu’aux audiences pénales. Cette assistance est de droit, étant d’après le texte pénal, liée à l’action civile. L’administrateur ad hoc est le mandant de l’avocat et à ce titre, il doit conserver la maîtrise et l’orientation du dossier.

 

Parfois, il arrive que des enfants ne souhaitent pas que l’on se constitue partie civile, se sentant coupable de l’incarcération de leur parent ou parce qu’ils subissent des pressions pouvant aller jusqu’au chantage au suicide. En ce cas, il est important de leur dire qu’ils ne sont en rien responsables des conséquences du signalement et que l’action civile est inopérante sur l’action publique diligentée par le Parquet. En d’autres termes, tout retrait de plainte ou de constitution de partie civile n’entraînera pas ipso facto la libération du parent incarcéré.

 

En tant que partie civile, l’administrateur ad hoc dispose d’une grande liberté, notamment :

-         pour faire des demandes d’actes (expertises, contre-expertises, audition…)

-         faire appel des décisions,

-         demander des dommages-intérêts

Mais en fait, certains administrateurs ad hoc ne disposent pas toujours de cette indépendance vis-à-vis de l’autorité judiciaire. On peut se poser la question lorsque l’administrateur ad hoc fonctionne sur le registre du « faire-plaisir » ou lorsqu’il existe un lien de subordination entre l’administrateur ad hoc-salarié et le magistrat-employeur.

 

Quant au retrait total ou partiel de l’autorité parentale, l’administrateur ad hoc peut-il le demander ? Pendant plus de 13 années, les présidents de cour d’assises m’interpellaient pour me demander ma position et lorsque je le sollicitais, ils y faisaient droit. La position actuelle des magistrats (siège et parquet) est de déclarer irrecevable une telle demande au motif que notre mandat est limité à l’action civile et que la protection de l’enfant appartient au titulaire de l’autorité parentale.

 

 

3°) L’art. 706-53 CPP

 

« Au cours de l’enquête ou de l’information, les auditions ou confrontations d’un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 sont réalisées sur décision du procureur de la République ou du juge d’instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal, en présence d’un psychologue ou d’un médecin spécialistes de l’enfance ou d’un membre de la famille du mineur ou de l’administrateur ad hoc désigné en application de l’article 706-50 ou encore d’une personne chargée d’un mandat du juge des enfants. »

 

Ce texte, institué par la loi du 17 juin 1998, a légalisé la présence d’un tiers lors des auditions et confrontations du mineur victime.

 

Cette disposition mérite quelques commentaires critiques. Tout d’abord, son application est limitée :

·        aux infractions mentionnées à l’art. 706-47 CPP, c’est-à-dire :

-         au meurtre ou assassinat de mineur précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou actes de barbarie. Infraction inapplicable en l’espèce de par le décès de la victime

-         viol commis par violence, contrainte, menace ou surprise (art. 222-23 CP)

-         exhibition sexuelle (art. 222-32 CP)

-         le fait de favoriser ou de tenter de favoriser la corruption d’un mineur ou le fait d’organiser des réunions comportant des exhibitions ou des relations sexuelles auxquelles un mineur assiste ou participe (art. 227-22 CP)

-         les atteintes sexuelles sans violence, contrainte, menace ni surprise sur un mineur de plus de 15 ans et non émancipé par le mariage commises par un ascendant ou par personne ayant autorité (art. 227-27 CP).

Les atteintes sexuelles commises sur mineur de 15 ans ainsi que la maltraitance physique sont exclues du champ d’application de l’art. 706-53 CPP. En d’autres termes, la présence d’un tiers aux auditions, confrontations n’est pas un droit pour ces enfants victimes.

 

·        aux 2 premières phases du processus pénal : enquête préliminaire et instruction, non à la phase de jugement.

 

Ensuite, ce tiers peut être  :

-         soit un psychologue ou un médecin spécialistes de l’enfance

-         soit un membre de la famille du mineur

-         soit un administrateur ad hoc désigné par le procureur de la République ou le juge d’instruction

-         soit une personne chargée d’un mandat du juge des enfants

Un seul d’entre eux peut être présent. Il n’y a pas prééminence de l’un par rapport à l’autre. Il revient donc au procureur de la République ou au juge d’instruction de choisir l’accompagnateur de l’enfant parmi cette liste.

Il s’ensuit que l’administrateur ad hoc qui est partie à la procédure, qui devra faire des choix au nom de l’enfant et conformément à son intérêt peut se trouver évincé de ces moments forts de la procédure pénale. Au regard de la mission qui est impartie à l’administrateur ad hoc : action civile et protection des intérêts de l’enfant victime, il aura des choix à faire pour lesquels il peut engager sa responsabilité, ne doit-il pas bénéficier d’un statut particulier au regard des personnes énumérées et avoir prééminence sur les autres en raison de sa mission particulière. Il est partie à la procédure et non simple « témoin taisant ».

 

De plus, le texte ne précise pas la nature du mandat confié par le juge des enfants. Ainsi, dans le cadre de son mandat, l’administrateur ad hoc peut avoir affaire à deux sortes d’éducateur, l’un chargé d’une mesure de protection, l’autre chargé d’une mission d’accompagnement.

 

Quant aux modalités pratiques, la présence de ce tiers peut être décidée à l’initiative du procureur de la République ou du juge d’instruction. Ces magistrats n’ont pas à solliciter l’accord de l’enfant victime. Par ailleurs, le mineur ou son représentant légal peut en faire aussi la demande. Quant au choix du tiers, seuls les magistrats peuvent en décider (à l’instar de la désignation de l’administrateur ad hoc).

La présence d’un tiers n’est donc pas obligatoire et cela relève du pouvoir discrétionnaire des magistrats.

 

La finalité de ce texte est de reconnaître à l’enfant victime :

-         le droit de ne pas être seul au cours de la procédure

-         le droit de bénéficier d’un soutien moral

 

Or, de plus en plus de magistrats instructeurs convoquent les administrateurs ad hoc en tant que parties civiles tout en refusant leur présence. Les arguments avancés sont les suivants :

-         leurs seuls interlocuteurs valables : l’enfant et l’avocat. C’est ni plus ni moins, considérer l’administrateur ad hoc comme un prête-nom, permettre à l’enfant d’être assisté d’un avocat. Nous sommes relégués à un rôle purement administratif.

-         permettre à l’enfant d’avoir une parole libre au regard du conflit familial. Cela revient à nous confondre avec le parent. Or, si on se substitue aux parents, nous ne sommes pas les parents. Nous sommes par définition neutres, indépendants par rapport au litige.

-         nous n’avons pas à avoir plus de droit que les parents. Les auditions se font hors leur présence. Certes, mais cette disposition pénale ne nous traite pas de la même manière. Le parent peut seulement demander la présence d’un tiers sans pouvoir assister lui-même à l’audition. Quant à l’administrateur ad hoc, lui seul est autorisé à être présent.

 

Que penser de cette convocation à partie civile reçue avec la mention en caractères gras « Votre présence, lors de l’audition, n’est pas requise » et du PV de 1ère audition qui s’en est suivi qui précise que la partie civile est avisée de son droit de formuler une demande d’acte ou de présenter une requête en annulation durant le déroulement de l’information ? Dans la mesure où seul le représentant de l’enfant peut le faire, les avis auraient dû se faire par lettre recommandée.

 

Une telle conception n’est pas sans conséquences :

-         des enfants nous reprochent de les avoir abandonnés

-         des avocats fonctionnent de manière indépendante, voire nous excluent de la procédure

 

Le législateur en 1998 voulait que l’enfant victime ne soit pas seul dès le signalement :

-         en donnant pouvoir au procureur de la République de désigner lui-même un administrateur ad hoc dès la phase de l’enquête préliminaire

-         en faisant en sorte que des personnes compétentes soient à ses côtés au cours de l’enquête préliminaire ou de l’information, aux auditions et confrontation.

Or, on peut constater que dans nombre de juridictions, aucune de ces dispositions ne sont appliquées. Il s’ensuit que les enfants victimes ne font l’objet, ni d’une représentation, ni d’un accompagnement.

 

Nous touchons là aux limites humaines. Les textes sont là, c’est leur application qui fait défaut.

Je dirais même que les cabinets d’instruction nous sont fermés depuis qu’un texte légal a légalisé la possibilité d’autoriser la présence d’un tiers lors de l’audition du mineur victime.

 

 

4°) L’art. R 53-8 CPP

 

« Dans les trois mois de l’achèvement de sa mission, l’administrateur ad hoc transmet à l’autorité qui l’a désigné un rapport dans lequel sont détaillées les démarches effectuées pour l’exercice de la mission définie à l’article 706-50 et précisées, le cas échéant, les formalités accomplies en vue du placement des sommes perçues par le mineur à l’occasion de la procédure. »

 

Ce nouvel article institué par le décret du 16 septembre 1999 exige que dans les 3 mois de l’achèvement de sa mission, l’administrateur ad hoc transmette à l’autorité qui l’a désigné, un rapport dans lequel sont détaillées les démarches effectuées pour l’exercice de sa mission ainsi que les formalités accomplies en vue du placement des sommes perçues par le mineur. S’il est facile de cerner l’objectif poursuivi par cette obligation, elle nécessite d’être précisée.

 

Le contenu du rapport doit se distinguer de celui qu’est tenu de rédiger l’éducateur chargé d’une mission d’assistance éducative conformément à l’article 375-2 du Code civil. Il s’agit ici pour l’administrateur ad hoc de retranscrire la fréquence de ses rencontres avec l’enfant, son avocat ; sa présence aux auditions, confrontations, audiences pénales. Cette affirmation repose sur ce constat : l’obligation de rendre compte ne concerne que les mandats pénaux, seuls mandats pris en charge financièrement par l’Etat. Ainsi, le gouvernement a posé le principe d’un contrôle a posteriori de l’effectivité du travail de l’administrateur ad hoc, dès lors qu’il a accepté de l’indemniser.

 

Par ailleurs, cet article nous donne une information quant à savoir quand l’action civile prend-elle fin :

-         au prononcé de la décision

-         après l’exécution du jugement

 

Dans la mesure où l’action civile a pour finalité de demander réparation du préjudice subi, par l’attribution de dommages-intérêts, la logique juridique voudrait que la mission de l’administrateur ad hoc prenne fin après l’obtention intégrale de l’indemnité allouée au mineur.

Dans la mesure où l’administrateur ad hoc doit le cas échéant, informer le magistrat qui l’a désigné des formalités accomplies en vue du placement des sommes perçues pour le mineur à l’occasion de la procédure, cela inclut donc implicitement dans les attributions de l’administrateur ad hoc la phase d’exécution de la décision sur intérêt civil jusqu’à la perception et au placement des sommes attribuées au mineur.

 

En tout état de cause, le mandat prendra fin avec la majorité de la victime conformément à l’article 488 du Code civil : « La majorité est fixée à 18 ans accomplis ; à cet âge, on est capable de tous les actes de la vie civile ».

Si la victime le demande, ce ne sera qu’une mission de soutien qui peut se poursuivre jusqu’à l’audience pénale.